Interaction des systèmes centraux et périphériques

Nous avons vu dans une publication précédente que l’activité cérébrale chez les patients TOP diffère probablement de celle des personnes qui ne souffrent pas du TOP. Cependant, pour soulager les symptômes du TOP, à défaut d’y trouver un remède, peut-être qu’il est plus utile de comprendre l’interaction entre le cerveau, la moelle épinière, le système nerveux périphérique et le système musculosquelettique.

Une petite étude bien contrôlée menée par Fung, Sauner et Day (2001) fournit quelques indices à cet effet. Les chercheurs ont mesuré l’instabilité subjective et objective aussi bien que le tremblement dans six patients TOP se tenant debout sous quatre conditions : yeux ouverts ou fermés, pieds ensemble ou écartés. L’instabilité subjective a été mesurée par les participants évaluant leur sensation sur une échelle tandis que l’instabilité objective était une mesure réelle du mouvement du corps. Le tremblement a été mesuré, comme d’habitude, par électromyographie de surface (EMG) des muscles des jambes mais également des muscles paravertébraux. Les muscles paravertébraux sont ceux qui soutiennent notre dos; ils sont près de la colonne vertébrale comme le mot paravertébral indique.

Les chercheurs ont constaté que la sensation subjective d’instabilité était plus grande avec les yeux fermés ou avec les pieds rapprochés pour les patients atteints du TOP, mais pas pour le groupe témoin. L’instabilité subjective s’accompagnait également d’une augmentation du tremblement de jambe pour des patients TOP. Cependant, l’instabilité objective et le tremblement des muscles paravertébraux n’étaient pas plus grands avec les yeux fermés ou avec les pieds rapprochés. La théorie de Fung et coll. est que les tremblements de jambe et l’instabilité subjective sont tous les deux en jeu dans le TOP.

« … la rétroaction proprioceptive anormale qui se développe à partir du moment où un patient TOP se tient debout donne lieu à une augmentation de la co-contractation des muscles des jambes afin de raidir les articulations et d’augmenter la stabilité. Parce que l’activité musculaire demeure tremblante, cela se traduit par une augmentation de la rétroaction proprioceptive de tremblements, ce qui augmente encore la sensation d’instabilité, et ainsi de suite dans un cercle vicieux de l’escalade de l’activité. » (p. 330 ; notre traduction)

La proprioception est notre sens de la position, du mouvement et de l’effort qui se fait d’abord sentir à travers notre peau, nos muscles et nos articulations, puis est signalé à notre cerveau via la moelle épinière.  Fung et coll. ne soutiennent ni ne réfutent l’implication du cerveau dans le TOP. Ils ne spéculent pas sur ce qui serait la cause de la « rétroaction proprioceptive anormale » à l’origine de ce cercle vicieux.

Une autre étude de Wuehr et coll. (2018) fournit également des informations intéressantes sur l’implication possible de la proprioception dans le TOP. Les chercheurs voulaient voir les effets qu’une stimulation proprioceptive musculaire des jambes aurait sur les tremblements et l’équilibre. La stimulation a été faite par l’intermédiaire d’un dispositif de vibration musculo-tendineuse (VMT) parfois employé en physiothérapie pour la rééducation proprioceptive. Ils ont mesuré le tremblement chez neuf patients TOP sous quatre conditions : 1) station debout 2) station debout avec stimulation VMT des deux jambes ; 3) station allongée ; et 4) station allongée avec stimulation VMT des deux jambes. Ils ont également mesuré l’amplitude de balancement du corps (instabilité objective) dans les deux conditions de station debout.

Tandis que la stimulation VMT n’a pas enrayé le tremblement ni changé sa fréquence, elle a réduit son intensité, a réduit le balancement du corps et a fourni un soulagement subjectif de l’instabilité chez quatre des neuf patients TOP. Wuehr et coll. (2018) concluent que, bien que la stimulation proprioceptive des muscles des jambes ne puisse pas enrayer le TOP (puisque son origine est probablement cérébrale), elle peut aider à perturber la rétroaction proprioceptive anormale causant la boucle de rétroaction vicieuse décrite par Fung et coll. (2001).

Références:

Fung VSC, Sauner D, Day BL. A dissociation between subjective and objective unsteadiness in primary orthostatic tremor. Brain. 2001;124:2:322-330.
https://doi.org/10.1093/brain/124.2.322

Wuehr M., Schlick C., Möhwald K., Schniepp R. Proprioceptive muscle tendon stimulation reduces symptoms in primary orthostatic tremor. Journal of Neurology. 2018;265:7:1666-1670.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29767354 (Résumé seulement)

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